Faïsa Sil'Méphis

Faïsa ne paie pas de mine : elle n’est pas grande ni très impressionnante, et sa jeunesse lui donne un air d’ange. Mais il ne faut pas s’y tromper : son corps est affuté et rompu au métier des armes, grâce à un entrainement quotidien rigoureux. Ses bras se sont musclés à force de manier l’épée, et ses jambes les portent sans faiblir, elle et son armure, des journées entières s’il le faut.

Malgré cela, la jeune femme garde encore dans l’ovale du visage, dans la rondeur des joues, une douceur qui rappelle l’enfance. Dont elle aimerait bien d’ailleurs se débarrasser. Sa peau brune est encore vierge de cicatrices, mais il est peu probable que cela dure vu la vie que s’est choisie la jeune femme.

Ses cheveux sont à la fois une fierté et un épineux problème. Si leur volume et leur texture soyeuse sont ses principaux atouts auprès de la gent masculine (de sa propre opinion), ils sont un calvaire à entretenir. Faïsa passe au moins une heure par jour à s’en occuper, sous peine de voir apparaître des nœuds ensuite impossibles à démêler sans tout couper. Et ça, c’est inenvisageable ! Les tresser reste la meilleure option au quotidien quand elle a besoin de ne pas les avoir dans la figure, c’est-à-dire tout le temps. Sauf quand elle rentre chez ses parents.

Ses yeux verts sont toujours très vifs, comme si elle était constamment sur le point de dire quelque chose ou de prendre une décision. Il est rare de surprendre Faïsa les yeux dans le vide, ou même la mine fatiguée. Son éducation et son caractère la poussent à toujours faire bonne figure, et à toujours garder l’initiative. Elle a naturellement une physionomie ouverte et sourit très facilement, ainsi qu’un côté autoritaire qui se manifeste par des sourcils froncés et une bouche pincée.

S’il y a une chose qu’on n’a jamais pu reprocher à Faïsa, c’est la couardise. Toujours volontaire, toujours prête à partir à l’aventure, elle ne recule devant aucune menace, poussée par un besoin de reconnaissance qu’elle refuse d’admettre. Il faut dire qu’elle a aussi été élevée comme ça, toujours poussée à repousser ses limites. La devise de sa famille, qui trône au-dessus de la porte de la résidence familiale est là pour le lui rappeler : Le courage est opiniâtre.

Elle a toujours eu une personnalité solaire. Ses abords tranquilles cachent un volcan en constante activité, qui aime plaire et être au centre de l’attention. Elle a toujours des idées à partager, des théories à tester, des plans à ourdir. Et elle entraîne immanquablement les autres dans son sillage. Bonne juge des caractères, elle aime être bien entourée et si sa confiance est lente à venir, elle est ensuite infaillible.

Toujours très affirmative dans ses idées, elle est trop sûre d’elle et s’est fait régulièrement remettre à sa place par ses instructeurs dans son adolescence. Mais peu importe, que cela concerne de petites choses ou sa vie toute entière, elle suit toujours ses idées sans se laisser perturber par les avis des autres. A ses risques et périls.

Pour autant, elle est friande de contradiction, et la compétition la stimule. Gagnante dans l’âme, elle ne supporte pas la défaite, et se montre trop souvent rancunière. Son côté rentre-dedans lui apporte régulièrement des ennuis, dans lesquels elle plonge à pieds-joints. La violence physique ne l’a jamais fait reculer. Elle n’est pas agressive avec le premier venu pour autant. Au contraire, ses proches sont les premières victimes de son caractère. Avec des inconnus, elle est toujours à son avantage : aimable, compréhensive et tolérante.

Bien que son vœu de devenir chevalier lui soit venu très jeune, Faïsa s’est montré aussi appliquée que possible dans les aspects les plus rébarbatifs (pour elle) de son éducation. Cultivée, elle s’efforce de ne pas trop l’étaler même si c’est parfois compliqué. Elle a acquis beaucoup de certitudes sur le monde qu’elle peine à remettre en question une fois plongée dedans.

Faïsa est née à Al-Jeit, dans une famille noble de moindre importance, mais possédant des liens très solides avec la caste dirigeante. Protégée dès le berceau des rigueurs du monde, Faïsa s’épanouit comme une fleur dans la douceur de la résidence familiale et fait bientôt tourner tout son entourage en bourrique. Son énergie affolante épuise l’une après l’autre ses nourrices, et pas une journée ne se passe sans que la petite furie ne casse quelque chose au gré de ses aventures imaginaires. Elle s’imagine tour à tour Impératrice, Capitaine Pirate, Sentinelle…

L’arrivée en ville de ses cousins met brutalement au pas les rêves de la petite Faïsa. De deux et trois ans ses ainés, Alaban et Mérion sont comme les deux doigts de la main. Envoyé chez leur oncle à Al-Jeit pour recevoir une bonne éducation, ils s’installent chez Faïsa et trouve rapidement beaucoup d’intérêt à tourmenter leur petite cousine de 8 ans, si naïve et agaçante. Bien sûr, celle-ci refuse de se laisser faire et bientôt la maison devient le théâtre d’une guérilla sans pitié.

Plusieurs mois de courses-poursuites, d’attaques et de vengeances mesquines se succèdent sans que les deux camps ne parviennent à un terrain d’entente. En infériorité sur tous les plans, Faïsa finit par craquer et se réfugie dans les bras secourables de son père, en quête de la puissance qui lui manque pour faire ravaler leurs sourires à ses cousins. Trop pédagogue pour prendre ouvertement parti, le patriarche préfère manipuler les trois enfants et les pousse à faire front commun contre une nouvelle menace : lui-même.

Sa stratégie fonctionne et Faïsa, Mérion et Alaban deviennent bientôt inséparables, pour le meilleur et pour le pire. Ils dévalent leur adolescence comme des rapides, à toute vitesse, se cassant la figure tour à tour et se relevant les uns les autres. Le premier coup d’éclat, et non des moindre, vient de Faïsa. Alors âgée de 11 ans, elle déclare avec aplomb que plus tard, elle sera Chevalier ! La nouvelle prend tout le monde au dépourvue. Ses parents se rassurent en se disant que ce n’est qu’une passade, et qu’elle a encore le temps de changer d’avis. Mais Faïsa n’en démord pas. Ni les inquiétudes de sa mère ni les doutes de son père n’ébranlent sa volonté, et ils finissent par céder.

Alors à 14 ans, Faïsa prend sa première leçon d’escrime sous la supervision de son père. Les leçons s’enchainent et la jeune fille y prend goût. Alaban, lui aussi destiné au métier des armes, ne perd pas une occasion de la provoquer en duel amical, et la bat à l’époque à plate couture. A 16 ans, on la confie à Sénelle Dil’Renval, Chevalier renommée qui la prend sous son aile.

L’apprentissage est rude, bien plus que ses leçons d’escrime, mais Faïsa s’accroche. Sénelle, si elle est impitoyable, n’est jamais injuste et Faïsa se nourrit autant de son attitude que de ses enseignements. En quelques années, son corps se transforme, ses muscles se dessinent. Son esprit s’aiguise. D’enfant excitée, elle devient femme farouche. Et elle ne rêve plus que d’une chose : faire ses preuves aux yeux de sa professeure, de sa famille et du monde.

A 22 ans, elle bout intérieurement. Quand donc sera-t-elle adoubée ? Sa maitrise de l’escrime dépasse celle de la plupart des aspirants ou chevaliers de son âge, elle est forte, rapide, vive comme un serpent. Qu’attend donc Sénelle ? Sénelle, elle aussi, est lassée d’attendre. D’attendre que sa protégée apprenne l’humilité et le recul que se doit de montrer tout bon chevalier. Comptant sur l’expérience pour achever ce qu’elle n’a pu terminer, elle adoube finalement Faïsa, qui vit le plus beau jour de sa vie.

Lancée sur les routes avec pour seule compagnie une jument orgueilleuse et un faucon mal dressé, Faïsa n’a jamais été plus heureuse. Après plus d’un an de voyages, elle a désormais accumulé une petite expérience et mené à bien sa première quête. En chemin vers Al-Jeit, elle aspire à quelques semaines de repos bien mérité avant de repartir à l’aventure.