descriptionLes absents ont toujours tort de revenir.
Ces derniers temps Milah n'avait pas arrêté. Elle jonglait entre les missions qu'on lui donnait en tant que dessinatrice et celles, bien plus importantes, pour le Chaos. Cette année était particulièrement chargée en voyage. Al Jeit lui manquait et elle y revenait à peine pour reprendre son souffle. De toute façon elle n'avait pas besoin de prendre de pause. C'était Milah après tout. Elle avançait dans sa vie avec l'assurance de celui qui n'a rien à perdre. Sans regarder autre part que droit devant, sans ralentir, sans dire un mot. En l’occurrence avant de se décider de venir au quartier général des mercenaires, elle était à Al Far. Elle y réglait une affaire assez capricieuse : un magistrat trop zêlé qui essayait de démêler la corruption qui régnait dans la ville. Il était malheureusement mort suite à une vilaine chute de cheval qui s'était infectée. C'était bien dommage pour la ville mais ça arrangeait bien le seigneur. C'est là qu'elle avait reçu le chuchoteur de sa mère qui était chez les mercenaires depuis quelques semaines.
Tu avais peut-être raison. La fille Bathory est revenue.
Elle avait essuyé la sueur sur son front, estimant que cet entraînement suffirait. La jolie boule de poil de sa mère avait disparue et elle avait renvoyé Verrue pour demander à sa mère de préparer les poisons et pommades guérisseuses dont elle manquait. Milah revenait plusieurs fois par an pour voir sa mère et surtout regarnir ses stocks. Elle sentait une certaine tension dans son esprit, des souvenirs qui voulaient follement remonter à la surface. Une fois dans sa chambre d'auberge, Hadès encore en vadrouille, elle s'était assise en tailleur par terre pour vérifier de nouveau son verrou et faire un tour dans les Spires. Elle en sortit plus calme.
Cette nouvelle était pourtant incongrue.
Milah régulait volontairement sa respiration. La colère était un sentiment qui n'avait d'utilité que lorsqu'elle pouvait l'utiliser en tant qu'énergie. Une fois la colère disparue, un léger sentiment de satisfaction flotta dans son regard. Elleynah était revenue. Elle l'avait toujours su. Elle ne l'avait pas attendu mais elle savait qu'elle finirait par revenir. Elleynah appartenait au Chaos comme ses parents avant elle.
Elle était enfin revenue.
Milah regarda le quart de lune qui brillait. Elle faillit sourire. Elle l'avait dit des années auparavant. Elle avait d'abord asséné qu'Elleynah reviendrait. Milah avait même recherché les assassins de son père. Puis elle n'y avait plus cru et son père à elle était mort. Et elle avait été seule avec sa colère, sa vengeance, sa haine. Un sentiment d'abandon était ancré en elle, et elle avait tiré un trait avec regret sur celle qui avait été la plus proche d'elle. Celle qui avait délié sa langue, celle avec qui elle pouvait parler, celle qui, elle le pensais, partageait ses idées. Changer le monde.
Tout avait changé depuis. Surtout depuis que la nouvelle s'était répandue. Elleynah ne s'était pas juste enfuie. Elle avait … trahi. Le mot n'était même pas assez fort. C'était plus que ça. Chez les mercenaires tout était acceptable, il n'existait aucune limite. Tuer, voler, aimer, fuir… tout était acceptable, au grand dam de Milah qui aurait aimé un peu plus d'obéissance, mais cela faisait partie du jeu. Une seule chose était odieuse. Un seul choix était pire que la mort. Renier son existence, passer une vie à genoux, obéir à l'Empire mais surtout obéir à une pseudo loi morale qui distinguait le bien du mal selon une échelle millénaire et indifférent aux hommes. Devenir un esclave d'harmonie. Chercher une Voie qui interdisait les autres, devenir un et un seul. Tuer tous les autres en soi et trouver un équilibre eugéniste qui n'acceptait que le parfait, le juste et le bon, ou du moins les illusions de ceux-ci.
Milah renifla et apprivoisa sa colère.
Elleynah était devenue marchombre. Au début Milah ne l'avait pas cru. Elle en avait parlé avec sa mère, elle était persuadée que c'était une mascarade, elle finirait par revenir. Ce n'était pas la Elleynah qu'elle connaissait, une Elleynah plus libre, plus forte, plus créative, plus multiple que ne pouvaient l'offrir les marchombres. Mais le temps avait passé et Milah s'était résolue. Elle ne l'avait jamais cherché, occupée à sa propre destinée, forgeant son avenir dans du roc à la sueur de son front. Elle voyait son enfance et son adolescence avec Elleynah comme un temps lumineux, innocent, insouciant, une pause avant de prendre le combat. Elle se rappelait la fureur de ses parents quand le père d'Elleynah avait été assassiné. Ils n'étaient bienveillants qu'avec les leurs et ils estimaient cet homme. Milah avait vu son amie dévastée et elle avait déjà ressenti les étincelles de glace qui la caractérisaient maintenant.
Cela n'avait plus d'importance. Si elle la croisait, elle la tuerait d'une lame dans le coeur, sans une hésitation, en la regardant droit dans les yeux. Ce n'était plus personne, une marchombre, une vie qui ne valait rien.
Comment avait-elle pu faire ça à sa mère, se demandait Milah. Elle hésitait à condamner Kaelleyn pour une éducation médiocre qui avait écarté sa fille du Chaos et à la prendre en pitié vu l'affront humiliant qu'elle avait subi en perdant un enfant à l'Harmonie.
Verrue traînait sur la table mordillant une corde, il observait du coin de l’œil Milah immobile et glaçante.
Qu'attendait-elle ? Pourquoi revenir alors qu'il était de notoriété commune qu'elle était marchombre ? Pensait-elle vraiment qu'elle pouvait infiltrer le Chaos comme ça ? Elle allait mourir après avoir souffert longtemps. Kaelleyn veillerait à sa souffrance. Milah veillerait à sa mort.
Les mercenaires devaient se saisir de cette opportunité pour lui soutirer toutes les informations nécessaires. Milah aussi avait quelques questions.
Pourquoi sa mère lui disait qu'elle avait raison ? Elleynah était elle revenue chez les mercenaires par foi au Chaos ? Depuis combien de temps était-elle là ? Pourquoi ? Comment Kaelleyn gérait cette nouvelle arrivée ? Kaelleyn étant un membre puissant et influent du Conseil et une collègue assez proche de Milah, tout le monde devait l'attendre sur ce point. Ne pas tuer sa fille, ne pas la voir comme sa fille non plus. La situation était délicate. Milah estimait Kaelleyn, c'était une mercenaire convaincue, efficace, douée, intelligente, puissante. Mais elle pouvait se montrer trop impulsive au goût de Milah et parfois elle semblait prendre les choses trop à cœur. Cependant elle excellait en bourreau, personne n'était aussi douée qu'elle pour la torture et Milah reconnaissait qu'ils avaient besoin de Kaelleyn. Milah n'étant elle même pas une bourreau très douée puisqu'elle n'avait pas l'habitude de faire durer la mort, elle acceptait les défauts de Kaelleyn puisqu'ils étaient intimement liés à ses qualités.
Elle espérait arriver avant qu'Elleynah soit tuée mais elle n'irait pas se jeter au quartier général. Ses affaires ne se finiraient pas seules.
***
Antiope gémit de plaisir quand Milah descendit. Elle enleva le peu de bagages qu'elle avait, la selle non utilisée, des cordes, ses flacons, la lance et l'arbalète. Elle flatta l'encolure de sa jument avant de lui donner du foin et de la laisser dans son box. Elle arriva dans la petite maison de sa mère. Une bâtisse modeste, leur vraie propriété se trouvait à Al Jeit. Le jardin et la bibliothèque étaient les deux endroits les plus entretenus. L'un donnait à sa mère la plupart des plantes dont elle avait besoin ainsi qu'un endroit pratique pour l'entraînement, l'autre recensait les écrits de penseurs du Chaos et de son père. Le salon était presque vétuste, une table grande mais souvent vide qui accueillait autrefois de longues réunions. Dans la semi obscurité du matin, elle vit le mot laissé par sa mère sur la table. Elle était repartie deux jours avant. Mais tout ce dont Milah avait besoin se trouvait à l'endroit habituel.
Malgré la fatigue du voyage, Milah se permit de faire un tour dans le jardin. Elle vit qu'Hadès était arrivé, il se tenait sur une branche, à côté d'un corbeau plus petit. Une femelle sûrement. Milah leva un sourcil et eut un léger sourire. C'était la première fois qu'elle voyait ce vieux célibataire endurci accompagné.
Elle se rendit ensuite dans la cuisine et entra dans les Spires pour accéder à l'endroit secret dans lequel sa mère avait mis les herbes, pommades, poisons, dont elle avait besoin. Milah remplit ses flacons et enduisit ses lames. Elle passa un baume sur ses trapèzes, ses tempes et ses cuisses afin de décontracter les muscles et de libérer l'esprit de la fatigue. Elle refit aussi le petit bandage qu'elle avait sur le doigt puisque Verrue l'avait mordue en chemin. Il ne recommencerait certainement pas vu la gifle qu'elle lui avait infligé. Elle finit par aiguiser son sabre et le nettoyer dans les moindres recoins. La matinée était avancée quand elle croqua dans une pomme avant d'aller se coucher.
***
La nuit était le moment préféré de Milah. Son père lui avait appris à l'aimer quand elle était petite. Elle se souvenait encore de ses paroles.
Tu vois Milah, la nuit appartient aux mercenaires. Et aux marchombres. C'est dans la nuit que se joue notre combat le plus important. Mais attention je n'ai pas dit que la nuit appartient au Chaos. En fait c'est même le contraire. Certains te diront que c'est le jour que le Chaos règne. Certains l'associent à la nuit. Aucun n'ont raison.
Le jour les hommes s'activent, c'est un bouillon. Les hommes sont le Chaos. Imagine toi une foule, c'est ton élément la foule en tant qu'enfant du Chaos. Tout peut se passer. Les pires et les meilleurs actions se déroulent le jour, tout bouge, tout est en mouvement. Mais c'est aussi là que l'Empire veut forcer la nature à se contraindre à son ordre, ses mœurs, son équilibre. Le jour le Chaos combat l'ordre.
La nuit … la nuit la nature reprend ses droits. La nuit tout peut arriver puisque la « loi » ne regarde pas. Les hommes ont peur la nuit, parce qu'ils ne voient pas, ils n'ont pas le contrôle. Mais ce qu'ils ne savent pas c'est que c'est normal… ils n'ont pas plus le contrôle le jour. Ils en ont juste l'impression. La nuit celui qui gagne ne doit sa victoire qu'à lui-même, parce qu'il était meilleure. La nuit, les mercenaires n'ont pas peur parce que c'est leur espace de liberté. La nuit tu n'as pas d'ombre, tu es l'ombre. Les marchombres pensent que la nuit leur appartient parce que la nuit est paisible mais ils sont sourds et aveugles. La nuit est bruyante de vie. D'une autre vie que la vie humaine, d'une vie plus primitive et plus juste, plus forte, plus désordonnée, plus belle parfois. Ne crois jamais que tu es seule la nuit.
Le Chaos est là tout le temps. Les mercenaires agissent aussi à toute heure mais ils se révèlent la nuit parce qu'il y a pendant le jour un faux prophète qui surveille tout, l'Empire.
Elle croisa et salua sans bruit certains mercenaires qu'elle reconnut. Un éclat de rire sortit d'une maison éclairée par des bougies. La nuit était véritablement un soulagement pour les mercenaires. Elle aimait voir ses frères et sœurs d'arme se révéler la nuit. Des bruits de lame résonnaient parfois quand certains se battaient. Elle s'approcha du bâtiment qui abritait les cachots. Les mercenaires qui gardaient l'entrée étaient des jeunes et ils ne servaient pas à garder les prisonniers mais bien à surveiller les entrées. Il y avait à l'intérieur des menaces bien plus importantes. De toute façon il fallait rentrer et trouver son chemin, ce qui était un miracle et seuls quelques mercenaires y avaient déjà été et savaient comment s'y rendre. Ensuite il y avait des envoleurs spécialisés et ou des maîtres marchombres dès lors qu'un prisonnier était dans une des geôles.
Elle s'arrêta, la capuche toujours abaissée. Hadès vint se poser sur l'épaule et ils la reconnurent. Elle ne leva même pas la capuche et ne dit pas un mot, la menace était déjà présente.
« Dame Bathory préfère que personne ne passe. »
Elle releva la tête et ils virent son regard. Il était aussi glacial qu'elle était irritée.
« La prisonnière n'est pas la propriété de Kaelleyn à ce que je sache. »
Elle effleura l'Imagination pour les projeter hors de son chemin. Juste avant de rentrer, elle se retourna.
« Pas la peine de lui dire, elle le saura. »
Elle comptait voir Kaelleyn dès le lendemain mais elle voulait d'abord voir la prisonnière. Kaelleyn pouvait très bien lui mentir même si elle n'avait aucun intérêt à le faire, et surtout elle dormait. Milah verrait Elleynah et elle irait ensuite voir Kaelleyn pour discuter de son cas. Milah voulait la tuer le plus vite possible. Enterrer toute possibilité qu'elle puisse s'évader. Les marchombres auraient trop à gagner, les mercenaires ne devaient pas s'engager maintenant dans une guerre qu'ils n'étaient pas sûrs de gagner. Et puis elle avait trop de questions auxquelles seule Elleynah pouvait répondre.
Elle ne comptait pas la torturer, et ce n'était pas un acte d'insubordination que d'aller la voir. Juste de la curiosité, et histoire de caresser l'idée de la tuer. L'occasion était trop bonne de tuer une traîtresse.
Son pas était silencieux et rapide. Une ombre jaillit de sa droite et elle l'esquiva sans mal en s'abaissant. Il s'approcha souplement tandis que Milah faisait apparaître une flamme l'éclairant.
« Janus. »
« Milah. »
Il était beau dans son costume souple. C'était le seul mercenaire a avoir une armure de la Légion Noire, comment il se l'était procuré, aucune idée. C'était un ancien marchombre et dorénavant un envoleur de talent. Un mercenaire en lequel Milah avait confiance… ou du moins une confiance de mercenaire.
« Je ne vais rien faire. »
« Dommage. »
« Qu'en penses-tu ? »
« Je ne lui fais pas confiance. Elle n'a pas renié la Voie, je le sens. »
Milah acquiesca. Elle prendrait son avis en compte. Il ne s'opposerait pas à elle, il n'était pas stupide. S'il l'avait fait, elle s'en serait retournée, elle n'était pas stupide. Il connaissait sa loyauté et sa foi inébranlable au Chaos. Elle était réputée comme radicale et elle n'agirait pas dans le dos du Conseil sauf si c'était pour le Chaos, elle ne cacherait pas non plus des informations importantes.
« Tu feras ton rapport à Kaelleyn. »
Il disparut. Elle fit rouler ses yeux avant d'éteindre la flamme.
« Évidemment Janus. »
C'était juste un rappel de sa part afin que Kaelleyn ne puisse rien lui reprocher. Bien qu'elle lui reprochait déjà d'exister. Elle ne lui demanda pas dans quel état était Elleynah, elle le découvrirait bien assez tôt.
La porte de métal est épaisse et lourde, le verrou n'en est pas moins un bijou de complexité. La geôle des marchombres. Seule une a pu s'échapper. Et elle l'avait fait une fois la porte ouverte. Quelle humiliation repensa Milah. Il fallait être mercenaire et aguerri pour connaître les secrets de cette serrure, et pouvoir l'utiliser. Elle fit tourner un loquet avec une certaine pression, pour passer une petite clef donnée par Hadès. Ses doigts appuyèrent sur les différents engrenages. Rien n'indiqua que la porte était ouverte qu'un léger roulement. Milah poussa la porte en ne laissant qu'un fin espace dans lequel elle se glissa. Refermant derrière elle, la capuche baissée et Hadès, silencieux sur son épaule, elle vit le dos de la chaise sur laquelle se trouvait Elleynah. Une chaise. Son cou, ses chevilles et ses poignets étaient menottés et accrochés au sol. La cape de Milah frôlait à peine le sol. Elle avait la main sur un poignard. Ses battements de cœur ralentirent. Elle ferma les yeux pour réprimer son envie de tuer Elleynah sans jamais revoir son visage. Une vague de haine passa doucement sur son esprit. Cela réglerait bien des problèmes, passés, futurs ou présents.
Elle lâcha la poignée sans bouger pour autant, son cœur reprit un battement lent mais habituel. Elle n'avait logiquement aucun intérêt à ce qu'Elleynah meure maintenant.
Elle observait en s'avançant. Vraisemblablement elle avait eu les cheveux attachés puisqu'on les lui avait coupé sauvagement. Elleynah avait toujours eu de magnifiques cheveux roux. Aussi enflammés que son esprit.
Milah se trouvait maintenant devant Elleynah. Elle la toisa sans exprimer aucune émotion. Elle n'était pas en très bon état, mais elle la trouvait relativement bien par rapport à la fureur présummée de Kaelleyn. Milah avait vu bien pire.
Elle reconnaissait encore son amie d'enfance. Le visage toujours enfantin, doux, laiteux, qui contrastait avec la violence des coups qu'elle avait reçu. Sa peau marquait. Les vêtements déchirés laissaient voir les traces de brûlures, les coupures et surtout les ecchymoses à tous les stades. Son visage non plus n'était pas beau à voir. Son arcade avait saigné tout comme sa lèvre, le sang séché laissait des traces marrons. Un œil était particulièrement gonflé. Une mèche tombait par-dessus. Elle était maigre et même ses muscles semblaient fondre. Pourtant Milah la reconnaissait bien. Il n'aurait fallu que la flamme de son regard pour compléter le tableau. Elle n'avait pas perdu de sa beauté. Même abîmée.
« Je sais que tu es réveillée. »
Elle gardait sa capuche abaissée. Elle savait que sa démarche avait changé depuis toutes ces années. Tout comme son regard, elle était devenue différente. Parmi tous les chemins qui s'étaient offerts à elle, elle avait choisi le plus dur, le plus noir. La lumière s'était éteinte en Milah. Mais physiquement elle n'avait pas tant changé depuis ses 15 ans.
Milah laissa tomber sa capuche. On aurait dit que son visage était sculpté dans la pierre. Ça aussi ça avait changé depuis son adolescence. Elle avait enterré et brûlé les sentiments. Pour devenir Mentaï elle avait sacrifié son humanité. La mercenaire était dans un contrôle permanent, c'en était devenu naturel. Si elle avait de nombreuses réflexions, elle n'avait jamais d'éclats. Tout était similaire. Seuls ses battements de cœur pouvait trahir des différences d'humeur. Ils étaient familiers. Elle se rendit compte qu'Elleynah était devenue une étrangère. Pas parce cette traîtresse avait changé. Mais parce que c'était elle-même qui avait changé.
« Tu n'as pas changé, Elleynah. »
De ses yeux complètement noir, le corbeau était intéressé par le morceau de viande sanguinolent en face de lui, mais il obéirait à celle qui l'accompagnait.