J'ai un paquet pour vous Madame

Bon, comment j’allais pouvoir faire moi. J’avais une commande spécifique qui avait été préparé, prête à arriver à destination, sauf que le coursier ne pouvait pas venir les récupérer pour les emmener on venait de me prévenir. Bon certes, on m’avait demandé s’il était possible de les livrer moi-même à l’Académie à une certaine Heatar Dil'Nocstra mais je n’en savais pas plus. Et puis si je livrais, je devrais fermer ma boutique, vu que j’y étais seule, donc le risque qu’un client vienne passer commande et que je le rate était important. Mais d’un autre côté, on parlait de l’Académie de Dessin, un batiment que je n’avais jamais pu visiter et qui éveillait ma curiosité. Et c’est cet argument qui me décida à me rendre sur place, l’envie de découvrir ce lieu important de la ville que je n’avais jamais approché, encore moins visiter.

J’emballais soigneusement mon colis pour qu’il ne se froisse pas avant de fermer boutique et me mettre en route, me retenant bien difficilement de sautiller de joie et d’anticipation sur la route. Il fallait rester sérieuse, professionnelle et ne pas se faire remarquer. C’était important pour mon image. Mais cela n’empêcha pas que sur les derniers mètres qui reliait l’Académie au quartier marchand que j’accélère le pas, pour finalement entrer dans l’enceinte et me retrouver submergé de beauté de toute sorte.

Si je m’extasiais déjà devant les boules de lumières qui éclairait les rues chaque soir, les formes à l’apparence fragile des bâtiments, tout l’art du Dessin visible à tous, là c’était autre chose. J’avais l’impression d’être au paradis, dans un lieu hors du temps où tout était possible, que je n’avais qu’à penser à quelque chose pour qu’il apparaisse tellement ce qui m’entourait me semblait impressionnant. Et je restais quelques minutes, figée sur place, la bouche ouverte, ne sachant plus que dire avant de me ressaisir en voyant qu’un homme venait vers moi. Je devais avoir l’air très bête donc je me dépêchais de me recomposer une expression un peu plus sérieuse même si mes yeux brillaient de curiosité. C’était certain, je finirais par questionner sur tout ce qui m’entourait, mais pour le moment je me tenais à carreau. Et je réussis à articuler distinctement le fait d’avoir un paquet à remettre en personne à Heatar Dil’Nocstra avant de suivre mon guide jusqu’à un hall où il me demanda d’attendre pendant qu’il allait avertir la jeune fille. Puis il disparut sous mes yeux, un instant il était là, l’instant d’après il avait disparu. Un « Wouah » s’échappa de mes lèvres et j’attendis bien sagement que la destinataire de mon colis fasse son apparition.

Je lâche un profond soupir en fermant mon livre. Me pinçant l’arête du nez, je fais en sorte de calmer mon mal de tête grandissant. Malgré tout l’amour que je porte à l’art du Dessin, l’histoire du Dessin et de Gwendalavir n’en reste pas moins un cours affreusement difficile et douloureux. Non seulement il se déroule sur plusieurs heures, mais le nombre d’informations est titanesque. Tout est très important, pour qui y accorde l’attention nécessaire. Même si je ne peux m’empêcher de me poser de sérieuses questions. Aujourd’hui par exemple, j’ai eu quatre interrogations sur le texte étudié : deux pourquoi et deux comment. Mais je n’ai jamais le courage de poser mes questions, surtout que, me basant sur les histoires d’Ewilan, je risque de me couvrir de ridicule. J’y accorde un intérêt très sérieux, mais j’ai vite compris que ce n’est pas le cas de tout le monde. Pour beaucoup ce sont des histoires à dormir debout, des comptines pour enfant. Alors je me contente de ranger ses questions dans un coin de ma tête. C’est ce que je fais en me levant, voyant les élèves sortir un à un de la salle. Comme à mon habitude, je prends tout mon temps pour éviter l’attroupement effrayant du couloir. Rien que d’imaginer quelqu’un me coller me donne envie de vomir.

-Mademoiselle Dil’Nocstra ?

Un homme vient d’apparaitre sur le seuil de la porte. J’ai un léger sursaut en levant la tête vers lui. Je le reconnais et finis par me détendre : c’est un des hommes travaillant pour l’Académie. Je descends à sa hauteur.

-Oui c’est bien moi, qu’y a-t-il ?
-Il y a quelqu’un pour vous, ainsi qu’un paquet.

Quelqu’un avec un paquet ? Je n’attends rien et c’est loin d’être mon anniversaire. Serait-ce mes vêtements ? Non, normalement c’est Jade qui s’en charge. Devant mon silence, l’homme me regarde, quelque peu interloqué. Je finis par hocher la tête et nous partons tout les deux dans un pas sur le côté.
Nous arrivons aussitôt dans une salle. Je la reconnais : elle sert principalement à la réception d’invités extérieurs à l’Académie. Etant donné qu’elle se trouve à l’autre bout de l’école, heureusement qu’il est venu me chercher : j’aurais mis bien 30 minutes à m’y rendre à pied. Je vois alors une jeune femme, habillée modestement, mais pas pauvrement non plus. Son teint est jeune et je reconnais aussitôt dans son regard la lumière de ceux qui rentrent pour la première fois à l’école. Elle tient dans ses bras un paquet et je me dis aussitôt « mes vêtements ? mais alors, où est Jade ? » Laissant ces questions de côté, je m’approche de la jeune femme.

-Je suis Heatar Dil’Nocstra. On m’a dit que vous aviez un paquet pour moi.

Ma voix est des plus posées et souples. Je ne tiens pas à montrer une attitude hautaine ou méprisante. Je sais rarement ce que pense les gens de moi quand ils me voient, alors autant faire l’effort d’être la plus sympathique possible…même si l’idée qu’elle tienne dans ses mains mes vêtements me terrifie au plus haut point.

Le temps que l’homme qui m’avait accueilli avait disparu je ne savais pas où, je regardais tout autour de moi, m’émerveillant de la beauté des lieux, non de leur magnificence, et encore, le mot était trop faible pour exprimer ce que je ressentais. Dans tout les cas, je ne regrettais pas d’avoir fermé boutique pour me rendre à l’académie et faire ma livraison de vêtements, je m’en mettais plein les yeux et ma curiosité s’éveillait de plus en plus. J’espérais même que la destinataire des vêtements prenne son temps pour que je puisse continuer à admirer tout cela. Mais j’avais dû offenser le Dragon ou sa Dame car une jeune vint se présenter comme étant Heatar Dil’Nocstra, autant dire la jeune femme que j’avais demandé à l’homme qui repartait, sa mission ayant été accomplis. Elle était très belle et avait l’air d’être toute douce avec les autres. Même sa voix était posée et calme, en bref, elle m’en mettais plein la vue sans même le vouloir. J’étais quasiment en admiration devant elle tellement je la trouvais belle.

Reculant d’un pas, je m’inclinais devant elle pour la saluer avant de lui tendre le paquet que je tenais avec précaution contre moi pour ne pas l’abimer ou le perdre. Je savais que les vêtements qui étaient à l’intérieur étaient particulier au niveau de l’entrejambe, mais je m’en moquais car chacun avait ses petits secrets, moi la première. On m’avait demandé de faire ainsi, je le faisais et cela convenait. En fait, j’était même contente de rencontrer la personne qui portait mes créations, cela me donnait des idées pour la prochaine commande, si prochaine commande il y aurait.

« Bonjour Lady Dil’Nocstra. Je m’appelle Helizabeth Anew, couturière de mon état. Désolé de vous déranger dans vos études, mais on m’a demandé de vous apporter vos vêtements, la personne qui devait venir ne pouvant pas aujourd’hui. J’espère que cela vous conviendra. Si jamais il doit y avoir des retouches, venez à la boutique et je vous les réaliserais. Je vous souhaite une bonne journée Lady Dil’Nocstra. »

Reculant encore de quelques pas, je fis ensuite demi-tour tout en gardant le nez en l’air pour continuer à regarder autour de moi, n’avançant pas bien vite. Je n’avais pas encore envie de rentrer à l’atelier, pas alors que j’avais l’opportunité de découvrir l’Académie. Et puis j’avais la chance d’être en compagnie d’une élève. Me stoppant net, je me retournais vers elle, les yeux brillants de curiosité, le doigt pointé vers le plafond.

« Excusez-moi, mais comment ils ont réussi à faire tenir, on dirait que cela flotte. Ce n’est pas possible de l’avoir fait de manière normale, c’est trop beau. Et puis c’est quoi les matériaux qu’ils ont utilisé pour cette pièce, ils sont trop beaux, c’est la première fois que je les vois je crois. Excusez ma curiosité, mais c’est la première fois que je viens à l’Académie. »

Elle me fixe, pitié arrête ça, je ne supporte pas qu’on me fixe ainsi. Avec courage je tiens son regard avant qu’elle ne me tende mon paquet, en se présentant au passage. Helizabeth ? C’est un joli nom. Etonnamment elle ne me dit rien sur les vêtements, pas la moindre question et plus étonnant encore son regard est… Juste pétillant de curiosité, pas de curiosité morbide non, juste LA curiosité. Je prends mon paquet, les mains un peut tremblantes. Je demanderais à Jade la raison de son absence, je m’inquiète peut-être pour rien.

-Merci… Je suis désolé de vous avoir fait déplacer…Vous avez l’air…

Soudain je vis que son attention divaguer, elle fixer tout autours d’elle en tournant. Je ne pus m’empêcher d’avoir un sourire. Même si c’est la salle la moins impressionnante, quand on ne connaît pas les pouvoirs de l’imaginaire, cela n’en reste pas moins incroyable. Elle pointa du doigt le plafond et une des lampes. Est-ce parce que je les vois tous les jours, mais je faillis penser « mais elles n’ont rien d’incroyable ces lampes » avant de me reprendre. Pour moi elles n’ont rien d’impressionnant, pour elle si évidemment. Je m’approche un peut et lui sourit.

-Elles tiennent par la volonté de son créateur, quand il les a imaginés, il a tout simplement pensé ainsi. De même pour les matériaux de l’académie, se ne sont pas des choses que vous pourrez retrouver de manière standard. Je ne sais pas si vous le savez, mais ce que nous imaginons ne reste qu’une durée déterminer dans notre monde. Ce que vous voyez ici, est l’œuvre d’un imaginaire puissant, ces lampes ne disparaitrons jamais. Si cela vous émerveille, je n’ose imaginer votre réaction au reste de l’Académie.

Depuis combien de temps n’avais-je pas parler aussi longtemps a quelqu’un ? Je faillis m’emporter dans mon explication, mais me retenue au dernier moment. Après tout on ne se connait pas, restons sobre. Même si je n’avais pas pus retenir un sourire dans mon discourt. Je serre le paquet contre moi, une idée me traverse l’esprit. Helizabeth a l’air d’être gentille peut-être que…Je repris mon souffle.

-Je peux vous faire visiter si vous voulez ? Enfin seulement quelque endroit, beaucoup de lieu sont interdis. Si vous avez du temps évidemment ! Je ne voudrais pas vous retenir dans votre travail.

A vrai dire je ne sais pas si j’ai « vraiment » le droit de lui faire visiter. Mais qu’est-ce que je crains ? Rien qui ne me fasse plus peur que ce qu’elle sait. Je suis sur qu’elle la comprit, mais comment ne pas espérer qu’au moins une personne, hormis ma famille, m’accepte. Je me prends trop la tête je pense…Si sa se trouve elle s’en fiche juste.